• A la hauteur

    Il ne se dit pas qu’il serait peut-être temps de me répondre, que le rendez-vous est dans trois jours et qu’il faudrait quand même que je prenne mes dispositions… Non. Silence radio. Je bous à l’intérieur, chaque minute qui passe me ferait imploser. Ma tension doit approcher le point de non retour.

    Il doit être en train de chercher une excuse. Je le soupçonne d’être en train de me planter, et de ne pas savoir comment me le dire. Merde, c’est moi ou les gens manquent cruellement d’attention envers les autres ?

    Moi j’ai appris à communiquer, à prévenir, anticiper. Eviter les malentendus. Certains disent que j’en fais trop, oui, je sais. Mais moi je préfère. C’est pas toujours heureux mais c’est souvent utile.

    Il attend quoi, en fait ? Si c’est un problème d’organisation, qu’il me le dise, je peux m’arranger. S’il n’a plus envie, qu’il me le dise aussi, je vais pas le bouffer. Mais pas cette attente. Non, pas cette attente qui me ronge.

    Il paraît  que l’amour et la haine sont si proches qu’on pourrait les confondre parfois. Exactement, à cet instant je le hais. Croiser son regard m’insupporte et mon cœur bondit à la simple lecture de son nom. Pourtant je continue de l’écouter, encore, comme si je ne pouvais faire autrement.

    Parce qu’il est en moi. Sacrément ancré en moi. Ses mots, sa voix, ses sons. Dans chaque pore de ma peau. Dans chaque poil qui se dresse quand je l’entends. Et cette entrevue, je la rêve depuis des années. Je l’attends depuis des semaines. Enfin le rencontrer. Croiser ses yeux, respirer son parfum. J’ai travaillé dur pour ça. Trouvé les moyens, les excuses, les raisons. Mis des choses en place.

    Alors cette attente est insupportable. Mes tripes se retournent à chaque minute de la journée. J’en gerberais tellement ça fait mal. Mes mains tremblent et mon corps est désynchronisé de mon cerveau. Cet état dans lequel ça me met. Dans lequel IL me met. Impossible de relativiser. Impossible de garder la tête froide.

    Le mode groupie je connais, je pratique depuis ma plus tendre enfance. Le mode amoureuse aussi, je suis une femme qui aime la vie et ceux qui sont dedans. Mais ce mode là je le connais pas. Le mode hypnotisée, possédée, dépossédée de tout bon sens et de toute jugeote. Incapacité totale de vivre pour autre chose que lui. Désarmée.

    Ma vie n’a de sens que parce qu’il existe. Je ne sais pas quand c’est arrivé mais c’est arrivé. Et je n’ai pas lutté. Depuis je respire au rythme de ses mélodies, je n’écris que dans l’espoir qu’il me lise, je ne parle que dans l’espoir qu’il m’entende. Je me livrerais corps et âme pour lui. Un mot, un regard significatif et je m’abandonne. Il ne faudrait pas hein. Mais maintenant qu’il est là devant moi je sais que je lui appartiens. La question est de savoir si lui le sait.

     

    ***

     

    J’ai hésité avant de venir. J’ai mis du temps à lui répondre, elle a dû croire que je revenais sur ma décision. Pourtant Dieu sait que j’ai envie d’être ici. Avec elle. Elle sur qui j’ai un œil depuis des mois, elle dont j’admire les mots. Si différents des miens et pourtant si identiques.

    La voir, la découvrir, mettre un visage enfin sur tous ces écrits. Tous ces mots, toutes ces phrases qui parlent si bien de moi alors qu’on ne s’est jamais rencontré. Je ne m’explique pas comment elle me comprend si bien. Comment elle me devine si parfaitement. Comment même parfois elle anticipe mes sentiments et mes actes.

    Le jour où j’ai cliqué sur le lien de ce blog j’ai souri, pour de mauvaises raisons. Je pensais tomber sur un énième fan-club cul-cul la praline. Et puis j’ai lu ses mots sur mon travail. Tellement justes, tellement précis. Elle a décelé chaque intention, chaque émotion, chaque double sens. Comme si nos cerveaux étaient connectés.

    Et dans tous ces mots sur moi il y a tellement d’elle. Elle se livre tellement à travers moi. J’ai l’impression de la connaitre par cœur, et j’espère ne pas me tromper. Parce que je ne me remets pas de ce que j’ai découvert. De celle que j’ai découverte.

     J’ai donc plongé dans son univers. Cet univers qui raconte le mien, cet univers dont je suis devenu accro. Avide de ses mots, j’ai fini par être avide d’elle. Elle qui est maintenant là devant moi. Et pour la première fois de ma vie j’ai peur.  Du haut de mon mètre quatre-vingt dix, pour la première fois de ma vie j’ai peur de ne pas être à la hauteur.

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  • Commentaires

    1
    Lundi 24 Mars 2014 à 22:06
    venise3

    J'adore ce type de texte avec le point de vue des deux personnes, comme dans les correspondances. Ou l'on découvre qu'au final ce que l'autre pense ou ressent n'est pas éloigné de ce que l'on pense ou ressens soi même. bien écrit :) comme d'habitude quoi :) <3

    2
    Mardi 25 Mars 2014 à 09:03

    Merci :)

    Ravie que ça t'ai plu. J'ai un roman sur le feu, j'utilise l'alternance aussi entre lui et elle.... J'aime vraiment bien ça :)

    <3 ma douce :)

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