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1-Nina : La vie est courte
Casting du télé-crochet Star Me Up – Paris – Octobre 2012
Salle d’audition surchauffée, brouhaha et trac. Mains moites et rouge à lèvres qui suinte. Elle espère au moins échapper aux auréoles sous les bras. Allez, quoi, de toute façon elle s’en fout, elle fait ça juste pour voir.
Elle a appris seulement en arrivant la composition du jury et n’en revient toujours pas. Que des pointures.
Cette année la production a clairement pris le parti de l’exigence, laissant de côté l’aspect people du programme. Il y a Vincent Chemay, producteur et dirigeant d’un label de financement participatif ; Pierre Ferré, petit-fils de Léo Ferré et auteur-compositeur, et Sophie Lebon -la seule femme-, professeur de chant à la renommée internationale.
Mais surtout, surtout, Simon Dallen. Poète et pilier de la scène musicale underground, pas vraiment coutumier des grosses machines médiatiques. Surprenant de le retrouver ici. Elle a grandit avec lui depuis son adolescence et le trouver là ne fait qu’accroitre son trac.
Elle se présente. Commence à chanter. Putain c’est dingue ce que c’est impressionnant.
Elle doute rapidement, ne sait pas quoi penser de ce qu’elle est en train de faire, désastre ou triomphe, elle n’en sait rien. Elle est paralysée.
A la fin du premier refrain elle s’arrête et rouvre les yeux, son cœur va exploser. Tout va très vite. Ils sont trois sur quatre à vouloir qu’elle passe à l’étape suivante, lui tendent le papier, elle a du mal à croire ce qui lui arrive. Joie. Elle balbutie quelques remerciements en partant, tremblante, elle se dit que tout ça est absurde…
La peur mélangée à l’excitation la feraient presque trébucher mais ok, allons-y alors, en avant la télé. La vie est courte.
*
Le lendemain Nina réalise à peine où elle était la veille. Elle repense à tout ça et a la naïveté d’espérer que tout se passera bien.
Stan, au bout du fil, est perplexe. Elle n’avait mis personne au courant. Même pas lui, son meilleur ami.
« T’es folle. C’est un plan pour pécho Simon, ou quoi ?!
-Pfff, t’es con. Non, je sais pas, ça m’a pris comme ça. Ecoute, on verra bien où ça me mène, hein. J’ai aucune attente, aucune prétention. »
Ils décident de dîner ensemble le surlendemain, en attendant il faut qu’elle s’occupe du bouclage de son expo, il lui manque au moins cinq toiles et en ce moment on ne peut pas dire qu’elle soit très inspirée. La moitié de ses pinceaux sont secs et inutilisables. Il faut qu’elle pense à en racheter, se dit qu’elle ira plus tard.
Elle jette un œil par la fenêtre et aperçoit un morceau de ciel bleu, tiens, il a mis du temps celui-là. Son bras lui fait mal aujourd’hui. Elle ne sait plus vraiment où elle va dans cette putain de vie, ses bagages sont trop lourds parfois. Elle met de la musique et se décide à ranger un peu cet appart bordélique, à défaut de pouvoir ranger dans sa tête.
Digérer un passé douloureux. Lui devoir ce qu’elle est maintenant. Gérer les angoisses imprévues. Une lutte constante avec elle-même qui ne finira jamais, pense-t-elle. Mais elle est assez fière de ce qu’elle est devenue, de comment elle s’est sortie de tout ça, alors finalement… Elle essaie de vivre avec.
De cette époque elle n’a gardé que Stan. Un jour elle a tout jeté, pour mieux recommencer. Ils sont partis bras dessus-bras dessous s’installer à Paris, loin de tout et de tous. Des gens en ont sûrement été blessés, elle n’a pas voulu s’en faire pour ça. Très égoïstement elle a fait passer son bien-être avant tout le reste.
Stan lui, ce n’est pas pareil ; c’est son jumeau, son âme sœur, sa vie. Son père, son fils, tout à la fois parfois. Elle se demande souvent s’il en aurait été de même s’il avait été hétéro. Ils auraient probablement commencé par baiser, bien sûr, et ça aurait tout gâché, inévitablement.
A suivre...
L'intégralité de l'histoire ici : Entre Mes Mains
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